La fibre depuis l’abonné… Le dernier (mètre) sera le premier

Marc DUCHESNE travaille sur les questions des réseaux fibre optique depuis 1983, d’abord à la SNCF . Il anime actuellement, pour sequalum, l’un des plus grands projets français en matière de Très Haut Débit, celui du département Haut-de-Seine. En plus de ses fonctions, Marc exerce également ses talents aux bénéfices des zones rurales, notamment en Seine-et-Marne où il est déjà coupable de quelques belles opérations.

Marc est l’un de ceux qui imaginent que les réseaux fibre optique pourraient se construire en zones rurales non pas vers mais aussi depuis les abonné(e)s. Il parle ainsi non pas du trop fameux dernier mètre mais d’un éventuel PREMIER mètre selon une logique fondée sur les services et la moins mauvaise implication de l’usager. Marc présente cette idée et évoque son origine ; une origine née notamment du relatif désintérêt des grands opérateurs pour les solutions fibre optique à l’abonné . Il explique d’ailleurs que de telles logiques, si elles restent à l’état d’avant projet encore sommaire en France, ont été testées hors de notre pays, notamment par fibrestream en Grande-Bretagne. De l’idée au projet, le chemin sera certes long ; la proposition mérite toutefois d’être sérieusement considérée.

9 commentaires sur “La fibre depuis l’abonné… Le dernier (mètre) sera le premier

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  1. Je sens que je vais être long dans mon commentaire… (c’est pour la bonne cause).

    Peut-être faut-il apporter une précision aux propos de Marc (auquel je souscris naturellement) en conseillant en somme de ne pas sortir trop vite la fibre de chez l’habitant pensant rejoindre d’un coup d’un seul le backbone à l’occasion d’une joyeuse Lève de Grange (en Corse on dit « Operata » lorsque tout le monde s’en va donner ainsi la main).

    Il y a un pré-requis à la Lève de Grange. Il faut d’abord mettre le réseau domestique à au propre comme dans l’offre d’AXON (axHOME). Le minimum pour un habitat innovant (.pdf) c’est bien de disposer d’un câblage (électricité et réseaux) de qualité. Il est sans doute là, précisément, le terreau sur lequel la fibre peu pousser (FFTH / Fiber From The Home), une intelligence qui ne serait pas réduite aux acquêts des boxes des opérateurs. Elle serait d’ailleurs là, la véritable révolution.

    Puisque le problème de la métrique réseau c’est justement cette difficulté à la cerner versus par où commencer … (je te cite Jean-Pierre 😉 et puisque c’est un casse tête de dingue (c’est moi qui le dit) et puisque les réseaux se développent finalement sans échelle déterminée a priori (scale free) autant se concentrer sur la cellule de base (le réseau domestique) c’est sans doute là qu’il faut semer de l’intelligence à haute dose.

    Puisque « le marché (le marché de l’intelligence dans l’habitat) demeure embryonnaire, le consentement à payer des habitants faible, voire nul, et l’appropriation des services un mystère » (je cite ici Amandine Bruguière responsable du groupe « Habitants Connectés » à la Fondation Internet Nouvelle Génération), puisqu’il n’y aura pas d’habitat intelligent sans désir, consentement et maîtrise de la part des habitants, alors commençons vraiment par le commencement, la maîtrise d’ouvrage des propriétaires :

    Mettons-nous (et des industriels de qualité comme ACOME et AXON avec nous) au service de cette maîtrise du réseau domestique par les seuls maîtres d’ouvrage légitimes, en l’occurrence les maîtres et maîtresses de maison (!). Montrons que chaque foyer est susceptible de devenir d’abord un véritable nœud d’échange universel, ce que je nomme de mon côté un ULIX (Universal Local Internet eXchanger) quelque soit le réseau de collecte sûr de lui et dominateur auquel il est encore pour un temps (très court) soumis.

    Bien sûr ce que je raconte là est détestable et détesté des opérateurs mais c’est sans doute aussi, en contrepoint, une perspective très riche pour les équipementiers et les milliers d’entreprises d’installation électriques et réseaux sur le territoire national qui en auront pour 20 ans à faire le tour de tous les chantiers (ceci compensera bien l’hostilité de ceux-là). Ne spéculons pas trop vite sur les emplois créés ou sauvegardés mais il n’est pas besoin d’être grand clerc en la matière pour imaginer l’impact.

    Ce n’est un mystère pour personne que de grandes et belles entreprises françaises comme ACOME et AXON ne sont pas parvenus aujourd’hui, malgré des efforts louables (je pense à Novea ou à la Maison Communicante pour ACOME), à faire émerger un réseau d’installateurs-conseils pertinents et efficaces sur ces terrains là au niveau national et à la hauteur des enjeux (en tout cas pas en nombre suffisant informés et formés).

    De mon point de vue c’est un problème de marque et de certification, un problème de légitimité et pour tout dire un manque de précision politique dans la stratégie. Il me semble cependant relativement facile de dépasser ce stade en créant une marque collective de certification pour les installateurs dont la légitimité serait évidente et en assurant sa promotion et la diffusion d’une offre qui, bien plus que technique est avant tout, j’insiste, politique.

    Il y a ces jours-ci une occasion rêvée de le faire. C’est l’appel à projets du Ministère de l’Économie, des Finances et de l’Industrie (Direction Générale de la Compétitivité, de l’Industrie et des Services) : « Actions collectives en faveur de l’innovation, de la création, du design et du marketing ». Si vous ne l’avez pas lu, prenez le temps de bien réfléchir aux enjeux et objectifs affichés qui en appellent à des approches innovantes de la stratégie client et des circuits de commercialisation et de distribution des produits ou services. Nous sommes ici face à un véritable cas d’école.

    J’ai personnellement pris l’initiative de monter un Comité de Liaison, d’Information et de Promotion pour apporter une réponse construite dans le sens de cette marque collective au Ministère (avant le 1er mars à 17:00). La réflexion est bien avancée, les premières entreprises partenaires se mettent en place, le territoire de démonstration est mobilisé et… la porte est ouverte !

    Elle est ouverte à ceux qui ont conservé un minimum de fraîcheur intellectuelle dans un débat qui, pour l’heure, est resté tellement confiné à la sphère des professionnels de la profession que l’on a totalement oublié de faire participer l’utilisateur final tant à la prospective qu’aux négociations et naturellement à la prise de décision. Étonnons-nous alors de ne jamais le rencontrer ! C’est pourtant lui, le vrai patron.

  2. Il existe, je crois, en France quelques personnes qui ont une vision à la fois singulière et juste de ce que pourrait être le développement local basé sur internet. Ces visions, même lorsqu’elles tendent au global, ont maintenant besoin d’être syncrétisées. Je m’explique, à partir de mon exemple personnel : je suis une géographe du développement local praticien de l’analyse systèmique ; j’ai une formation initiale de technicien, il n’est pas possible de me faire passer n’importe quoi en électronique, en informatique, en énergétique. J’ai subi aussi une formation d’ingénieur en organisation ; il n’est pas possible de me faire passer n’importe quoi en théorie des graphes, en comptabilité, en IP, sur les applications web et même en biologie, voire en théorie du chaos ou en mathématiques fractales. La difficulté que je rencontre dans ma relation avec des gens cherchant les mêmes réponses que moi, ce sont mes préconceptions ; par exemple (pour les choses qui nous occupent), je travaille avec la conviction que les techniciens sont toujours capables de réaliser et de faire fonctionner correctement une topologie de réseau possible. Si un gars de, je cite au hasard, CISCO me dit l’appareil qui maîtrise la logique que vous décrivez existe et vaut tant d’euros, je commence à croire (1) que mon raisonnement a été validé et (2) qu’une marche opérationnelle a été franchie. C’est de ce syncrétisme là dont nous avons besoin.

  3. À partir du constat (1) que la vie choisit toujours la puissance ; (2) que la densité 100% d’un réseau correspond à sa puissance théorique maximun, nous pouvons nous étonner que la question des réseaux de libre échelle n’ait jamais débouché sur de l’opérationnel.

    L’architecture réseau de transport/réseau de distribution s’éloigne théoriquement non seulement de la puissance maximum, mais encore de la puissance nécessaire à un réseau afin de produire plus de richesses qu’il n’en consomme (au niveau macro).

  4. On peut s’en étonner, Bernard, et en même temps l’explication est sans doute toute simple, il y a toujours une latence importante entre une trouvaille de la vie quotidienne, en effet, au point où elle est portée à la connaissance du public, puis reconnue.

    C’est tout à fait le cas de l’absence d’échelle déterminée a priori pour les réseaux. Nous en avons connaissance sans que pour l’heure elle ait été reconnue et exploitée au plan opérationnel.

    Une amie (Nadine Manzagol) m’a fait lire ces jours-ci cet article qui traite des relations entre axe paradigmatique et axe syntagmatique.

    Il est tout à fait intéressant de voir la lenteur des transformations au XVIème siècle pour digérer et traduisent le passage du géocentrisme à l’héliocentrisme.

    Les réseaux ont sacrément secoué une bonne partie de nos représentations mentales mais j’ai la conviction que nous sommes à deux doigts de pouvoir maîtriser ces notions au plan opérationnel. Français, encore un effort syncrétique pour être enfin révolutionnaires 😉

  5. Il est possible d’argumenter sans fin mais je suis en général opposé à l’application des « principes » du structuralisme à toutes les sciences humaines (grossièrement, faire comme si assembler des métaphores équivalait à une épistémologie robuste).

    Le fait qu’un américain (un nom?) ait remarqué, il y a quelques années, qu’internet était un réseau sans échelle (ou plutôt à libre échelle) pose deux questions opérationnelles principales :

    1/ Existe-t-il un moyen de densifier un réseau à libre échelle (de lui donner une puissance efficace équitablement partagée) ?
    2/ Peut-on choisir un niveau d’échelle pertinent afin de reformater le réseau mondial (en réseau normal) (ce que propose Olivier en choisissant l’échelle habitat) ?

    (Il est possible que nous débouchions sur une évidence du type : ce sont les réseaux à échelle libre qui sont normaux. Un peu ce qui s’est passé, il y a quelques années, sur les systèmes : ce sont les systèmes en déséquilibre qui sont (les plus) normaux.)

    Ceci dit, la théorie des graphes est une théorie mathématique (qui propose une représentation de la réalité) ; pas une théorie physique ou biologique.

  6. Olivier,

    L’article que tu signales dit plus qu’une éventuelle métaphore structuraliste sur le réseau internet : il propose une réflexion sur l’invariance d’échelle que représente la théorie mathématique des fractales : l’invariance d’échelle, en matière de réseau, c’est un peu le contraire logique des réseaux à libre échelle.

    Je suis incapable de faire une proposition opérationnelle qui aboutisse ce raisonnement.

  7. J’entends bien la contradiction Bernard. Mais c’est précisément là que se situe l’excellente nouvelle. Les échelles ne sont pas déterminées a priori, nous sommes les mariés de la Tour Eiffel et pouvons nous permettre sans aucun complexe de feindre d’organiser ces mystères qui nous dépassent.

    Choisissons l’échelle la plus plaisante pour agir car ni les uns, ni les faits ne pourront nous contredire 😉

  8. Olivier,

    J’aime bien que tu es formalisé le choix ( et du même coup, repéré l’adversaire).

    Il me paraît démontrable qu’il est possible d’organiser (faisons comme si nous étions des démiurges) la cohérence de l’invariance d’échelle du réseau mondial à partir (disons) d’une sous-boucle locale type à densité maximum.

    Et capable de se satisfaire de la schizophrénie de FT et des autres industriels d’internet.

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