THD Rural : du grand mensonge aux premières vraies actions ?

100_0651Fibre optique : la fin du grand mensonge. Tel était le titre d’un article de LeMagIt du 20 février 2015 auquel Paul Champsaur a accordé une Interview où il estimait que « malgré les promesses des différents gouvernements, un grand nombre de Français ne seront sans doute jamais raccordés à la fibre optique et devront continuer à se satisfaire de ce que peut leur apporter le réseau cuivre ou des moyens alternatifs comme le Wi-Fi ou le satellite. » Cette prise de position de l’ancien patron de l’Arcep marque-t-elle la fin de l’insupportable langue de bois actuelle sur un programme THD rural toujours en panne ? Va-t-on enfin se décider à se donner les moyens d’agir ou, au moins, à faciliter les actions de ceux qui le voudraient ? Comment débloquer la situation ? Dans le droit fil de son intervention de janvier 2015, nous poursuivons la publication de nos échanges avec Joël Mau sur ce sujet.

Le cadre actuel vous semble-t-il en mesure de permettre le déploiement de réseaux FttX en zones peu denses et particulièrement en zones rurales ?

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Joël Mau

J. Mau : Une conclusion me paraît désormais s’imposer : ce n’est pas le cadre réglementaire et financier qui explique la relative lenteur des déploiements optiques très haut débit en zones moins denses et rurales. L’expérience des déploiements passés, par exemple ceux liés aux politiques DSL, montre que les dispositifs dont nous disposons, éventuellement légèrement infléchis, pourraient permettre de couvrir toute l’Europe, y compris ses zones les moins denses et les plus rurales.

Au niveau Européen, il est même de plus en plus reconnu que cela pourrait être l’un des investissements à la fois les plus rentables dans le domaine des infrastructures et le plus générateur de multiples externalités (développement économique, emplois locaux, modernisation de l’action publique,…). Même les équipementiers mobiles conviennent que la fibre optique est l’avenir du mobile !

Et pourtant, sauf exception, rien ou presque ne se met en place côté THD Rural ? Comment l’expliquez-vous ? Comment mettre un terme à ce que Paul Champsaur nommait, dans une récente interview de février 2015, le « grand mensonge » ?

Les raisons de la lenteur actuelle sont à chercher en particulier du côté des jeux d’acteurs privés et publics. L’inertie du déploiement du THD hors zones métropolitaines s’explique notamment par la primauté laissée aux grands opérateurs historiques et par un état de « grand aveuglement » de nos décideurs et acteurs publics. Ces acteurs « historiques », pour profiter le plus longtemps possible de leurs positions établies sur le cuivre, ont contribué à répandre et à maintenir nombres d’idées reçues. Ces zones ne sont pas rentables ; le public ne sait pas faire ; de toute façon, en ruralité, ils n’ont pas besoin de tels débits et usages ; cela prendra bien 30 à 40 ans, il faudra bien vous y faire et accepter une France à deux vitesses ; de toute façon nous ne pouvons plus nous le permettre financièrement, le cuivre et plus globalement la Montée en Débit sont bien suffisants… Il faut reconnaître que ce travail de lobbying a été bien fait et que des personnes et entités éminentes ont les mêmes réflexes qu’un Ministre des Télécommunications au début des années 60 « Le téléphone est un luxe dont les Français peuvent se passer ». De fait en 1970 nous étions à moins de 10% de lignes par habitants et derrière un pays comme la Roumanie en Europe. En 1974 seulement un sursaut national d’orgueil nous a fait lancer le plan Delta LP, plan de production de Lignes Principales. La France entre 1974 et 1984 a évolué de 6M de clients à 26M de clients. Oui vous avez bien lu, toute la France a été couverte en 10 ans. Or ce chantier était d’une ampleur sans commune mesure avec le déploiement des réseaux fibre optique. Pour aller plus loin, il est possible de lire les pages annotées p88 à p100 sur l’histoire des télécommunications dans la présentation téléchargeable ici .

Les contraintes qui pèsent sur le déploiement des réseaux THD filaires et du mobile sont aujourd’hui nettement différentes. Sur le mobile, les opérateurs doivent acheter les licences et s’engager sur un pourcentage de couverture de la population avec des délais contractuels. Tout manquement peut donner lieu à pénalités. Rien de tel sur les réseaux en fibre optique  alors qu’ils vont rapidement devenir essentiel à toute la société. Les pouvoirs publics n’ont donc pas encore pris suffisamment conscience de la nature de cette infrastructure autant voire plus stratégique pour la société au 21ième siècle que celle du spectre hertzien.

Par-delà ce déficit d’encadrement conventionnel, il me semble également indispensable de sortir de la trop simple vision d’opérateurs historiques intégrés verticalement. ORANGE, SFR, FREE et ByTel devant faire face, d’un coté, à des petits opérateurs de Réseaux d’Initiative Publique et, de l’autre sur les volets services, aux GAFA (Google, Apple Facebook, Amazon). Le nombre et la diversité des membres de la FIRIP, créée voici juste deux ans, est une bonne illustration de la richesse des jeux d’acteurs à prendre en compte dans l’action publique. Cette fédération compte déjà 130 entreprises.

Ainsi, malgré cette richesse du paysage télécoms français, la situation de notre pays relève malheureusement encore d’une politique de couverture « attentiste». Une politique qui s’avère pourtant à la fois peu rentable, lente et incapable de couvrir tout le territoire. Une politique qui présente en outre de forts risques de distorsion de concurrence via les modalités des offres sur fibre. C’est ce que nous avons rappelé dans notre contribution à l’ARCEP lors de sa consultation sur les tarifs d’accès à la fibre. « Le scénario attentiste actuel est donc très peu rentable et risqué. Ainsi il ne peut s’envisager pour de l’initiative privée qu’en zones les moins coûteuses à la ligne. Toutefois ce scénario « attentiste » a un grand intérêt pour des acteurs établis sur le cuivre : Il rend quasi impossible l’arrivée de nouveaux acteurs. Il est donc sécurisant, même si globalement très inefficient pour l’Europe. Une analogie d’un tel scénario c’est la course au Far West : Aller vite planter son drapeau et poser les clôtures pour s’approprier le maximum de terres. L’urgence ensuite d’exploiter ses terres non conquises par des concurrents est moindre. »

On se croirait dans une économie quasiment de type coloniale… Quels seraient donc pour vous les leviers à actionner pour débloquer la situation?

Plus que de nouvelles réglementations ou de nouvelles subventions publiques, il me semble surtout nécessaire qu’une volonté politique soit clairement définie et qu’elle résiste aux conservatismes. Elle devra notamment créer un cadre favorable à l’accélération de la migration des lignes cuivre ou coaxiales non modernisées vers des accès via fibre optique. Nous avons récemment publié plusieurs propositions détaillées de scénarios à ce sujet ; des scénarios qui préservent d’ailleurs à la fois les intérêts de l’opérateur historique propriétaire du réseau cuivre et les finances publiques.

Cette contribution détaille plusieurs scénarios ; elle montre que d’autres options sont possibles en jouant de plusieurs leviers complémentaires. Nous avons notamment modélisé les impacts de l’évolution des tarifs de dégroupage cuivre. Nous avons également étudié plusieurs solutions pour corriger la concurrence déloyale de la péréquation cuivre et pour faciliter la migration du cuivre vers la fibre optique. Nous avons même analysé une solution qui consisterait à racheter le réseau cuivre. Tous ces leviers peuvent donc actionnés seuls ou de concert. Notre simulateur Excel intègre l’ensemble des facteurs pris en compte. Ces travaux montrent ainsi qu’avec moins d’argent public, moins de risques pour les investisseurs passés (sur le cuivre) ou futurs (sur la fibre), l’Europe pourrait se doter, en une dizaine d’année seulement, d’une infrastructure fibre partout et pour tous, créatrice d’emplois locaux directs et indirects.

En termes législatifs, et dans l’attente de la très en retard loi sur les télécom, quels seraient selon vous les leviers les plus importants à caler ?

Les principaux leviers me semblent être de trois ordres. Il faut tout d’abord renforcer la dynamique concurrentielle sur le fixe. Il s’agit ensuite d’instaurer un véritable cadre de confiance. Il est enfin indispensable de sécuriser les investisseurs.

Pour le premier point, l’organisation d’un cadre concurrentiel dynamique reste en effet l’une des clés pour favoriser l’innovation. Innovation qui ne vient quasi jamais des acteurs et des situations établies. Il est en effet historiquement constaté que ce n’est pas en protégeant les acteurs qui sont souvent sujets « au dilemme de l’innovation » que nous préparons au mieux notre futur commun. Pour ne pas réduire cette intensité innovatrice liée au niveau concurrentiel, il faut notamment clairement inscrire dans la loi au niveau Européen la Neutralité d’Internet et l’étendre au-delà du seul réseau.

Le point n°2, qui consiste à instiller un cadre de confiance, représente à mon avis pour l’Europe la vraie killer application du THD fixe ou mobile. Cela implique notamment un cadre législatif Français mais surtout Européen sur la Privacy, pour conforter nos valeurs Européennes et redonner le contrôle aux utilisateurs. Pour faire un peu de politique, la finalité première devrait être le citoyen et l’emploi local et non l’exploitation de leurs données opérée sur d’autres continents.

Le troisième point à examiner au sein de la loi numérique qui a pris beaucoup de retard, permettrait de sécuriser/rassurer/réduire les risques pour les investisseurs comme pour l’ensemble des acteurs du THD. Cela passe par des actions incitatives à la migration vers la fibre, par l’innovation et l’accompagnement de nouveaux services et usages notamment en dehors du très classique maintenant triple-play. Il s’agit également de favoriser l’émergence de multiples acteurs de toute taille, notamment sur les services couplant numérique et proximité physique, pour créer des cités et des territoires agiles, connectés et durables.

Pensez-vous qu’il puisse exister, comme l’explique plusieurs participants de l’auto-construction ou du Do It Youself, un modèle alternatif de construction et d’exploitation pour les espaces ruraux ?

C’est un sujet que nous avons souvent débattu avec des amis. Je crois beaucoup à ce schéma d’entraide, de prise en main par les demandeurs du traitement de leurs besoins, de financement en cycle court où il est touché du doigt l’utilisation concrète de l’argent ou des efforts mis. De tels déploiements (cf projet Engage, déploiements menés en Suède par exemple, projet B@rn en GB…) démontrent aussi qu’ils sont possibles et réalistes. En France, je verrais bien nombre d’associations locales affiliées à la FFDN évoluer vers la Fibre optique.

Toutefois la collecte, l’exploitation, la sécurité, l’accès ouvert et neutre aux fournisseurs de contenus et services, sont des points à prendre en compte. Ainsi pour que ces actions aient le maximum de chances de réussir, elles devraient s’inscrire dans le cadre du déploiement de la collectivité locale en se substituant localement au partenaire de la collectivité (généralement un opérateur privé) ou en facilitant/accélérant/réduisant les coûts de ce déploiement. Il conviendra bien entendu pour cela de respecter notamment les règles d’ingénierie et les équipements retenus par la collectivité, prévoir de se raccorder au NRO ou PM décidés globalement, selon des modalités convenues par l’écosystème…Ces actions sont donc vues pour moi comme accélératrices et complémentaires à un plan de couverture du territoire par une collectivité publique.

Il y a par contre deux marchés où ces initiatives de « Do It Yourself  – Faire Soi-Même » peuvent s’avérer très pertinentes et autonomes localement :

  • Mutualiser entre plusieurs clients grands publics un accès fibre en déportant cet accès via des solutions hertziennes par exemple.
  • Mutualiser pour plusieurs petites entreprises ou professionnels un ou deux accès fibre (voire un lien de secours), par exemple sur une petite ZAC ou un immeuble hébergeant plusieurs professionnels en gérant le cloisonnement et l’affectation des ressources entre les divers demandeurs.

Dans les deux cas, cela implique des personnes compétentes, bénévoles ou établies comme petite entreprise de proximité, engagées sur la durée, et apportant une forte expertise pour garantir notamment la séparation des flux et la neutralité de l’accès, et apporter des prestations de services : VPN, hébergement, …

26 commentaires sur “THD Rural : du grand mensonge aux premières vraies actions ?

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  1. Est ce vraiment un problème de confiance ? Côté Etat, les blocages majeurs bloquent toujours. Côté Collectivités, les fusions territoriales figent à nouveau. Côté prochaines élections départementales, une catastrophe sans précédent s’annonce. Tout le monde le sait. Personne ne bouge comme si les programmes extrêmes avaient quelques réalités utiles… La fin du monde politique ? Je n’en sais rien mais pas gros moral quand même.

  2. Toujours intéressant et gratifiant de constater que l’on n’est pas le seul à penser quelque chose, surtout lorsque un tel personnage partage cette pensée…

    Nous savions tous ici – et avions déjà dit un peu partout – que le Plan France THD présente des failles, dont la plus importante est l’absence de couverture des zones Rurales. Quand 80% de la population nationale vit sur 20% seulement du territoire, il est facile d’ignorer les 20% des Français éparpillés sur les 80% « restant ». Récemment, en public, le président du syndicat mixte d’une des plus grandes régions françaises avait dit, clairement, à propos du programme de déploiement du THD sur sa région : « Pour les Ruraux, on verra après 2025, voire 2030. » Autant dire : jamais.

    Pourquoi ? Simple : Le coût exorbitant de déploiement des infrastructures optiques. Coût insupportable par les acteurs privés comme par la Collectivité. Explication de ce coût : Les solutions techniques utilisées. En 2015, on déploie le FTTH avec des câbles optiques et toute la quincaillerie qui va avec : boites de raccordement, têtes de câbles, etc. dont la conception remonte aux années 85-90. Imaginez-vous travailler aujourd’hui avec un PC de 1986 ? Ben ça. Mêmes structures de câbles, mêmes dessins de cassettes de lovage de fibres, mêmes techniques d’épissurage (la fameuse soudeuse qui fait la joie des élus et des ministres, tout contents de voir une étincelle magique), mêmes méthodes de tests (quand il y en a…), etc.
    Ces solutions ont été imaginées, développées, mises en oeuvre, sur les réseaux longue-distance puis les réseaux métropolitains. Du B2B, en quelque sorte. Jamais pour entrer dans un immeuble des Hauts de Seine ou aller chercher une ferme isolée au creux d’une vallée béarnaise, et encore moins pour irriguer un appartement, fusse-t’il moderne.
    Les 20 à 30 milliards d’Euro cités partout pour évoquer le budget nécessaire au fibrage du pays viennent de là. Des produits inadaptés au secteur concerné : La Fibre Au Domicile, utilisés par des techniciens mal formés chez des installateurs payés à coup de lance-pierre. Cherchez l’erreur.

    LA Solution : Prendre la feuille blanche, et dessiner ENFIN les solutions 100% adaptées aux besoins.

    On aurait là un formidable levier pour recréer l’industrie Telecoms française.

  3. @Joel Je suis naturellement 100% en phase pour le DIY, ou plutôt le BYO « Build-Your-Own ». Cependant, pas n’importe comment, ni par n’importe qui. Pour que cela marche, il faut impérativement concevoir une structure et des solutions techniques de type industriel. Couverture nationale, produits sur catalogue, en stock, méthodes standards, etc. Une franchise, en quelque sorte…

  4. j’aime bien l’idée que tu nommes « franchise » même si cela n’en est sans doute pas une… plus une coopérative. A creuser !

  5. Stop digging ! It’s time to « Boost Your Own Communication Access Plan » joining your neighbors to build together an independent peer to peer, powerful and agile network for the quarter of the cost of your overwhelmed static current network !

    You just have to move few signifiant details in your godamm old mind ! Bloody consumers !

  6. En réponse à Marc, comme toi le DIY oy BYO ne peut s’envisager que dans un cadre national bien défini et surtout avec des équipements innovants même si plus chers qu’actuellement, « plug and play », nécessitant peu ou pas de compétences, évitant les erreurs de pose et réduisant les recettes. Que cela prenne la forme d’une association, coopérative, franchise en lien avec l’opérateur local retenu pour le département,…il importe surtout que cela s’insère parfaitement dans la planification locale, que cela s’insère dans le SIG, que cela soit en un mot exploitable même après la disparition de l’entité DIY.

  7. Il est loin le temps où l’actuel directeur de la MTHD côtoyait dans une réunion « OVEI » , le président de Tétaneutral (Laurent Guerby) et l’ami @Turblog booster de l’association PC-LIGHT-89, …
    L’état stratège peut-il encore tolérer le DIY même bio ?!

  8. Extraordinaire ! Après la disparition de l’entité DIY ! Parce que cet opérateur d’initiative privé devrait disparaître après avoir joué les supplétifs ! Je crois que je vais faire un petit malaise. Comment pouvons-vous arriver à des conclusions aussi diamétralement opposées ?

    Ce n’est même plus une différence d’appréciation, c’est une ligne front contre front !

  9. Il est loin le temps, où dans le cadre d’une réunion OVEI (On Vous Explique Internet) organisée au CESE, le président de Tetaneutral (Laurent Guerby) et le booster de l’association PClight89 (l’ami @Turblog) échangeaient librement avec l’actuel directeur de la MTHD…
    L’état stratège et sa mission THD, sous la coupe de Bercy via DGE et Agence du Numérique interposées, truffée d’ex ARCEP, peuvent-ils réellement tolérer le DIY même bio…
    ?!?

  10. Pour éviter le malaise à Zablo, il manque la disparition « éventuelle » de l’entité DIY, et j’aurais aussi bien pu ajouter que le problème est le même après la fin de la DSP, PPP … Il faut que le réseau continue à vivre, fournir ses services, reste en un mot en réseau.

  11. Pour Michel @mlb9146 , ta remarque est intéressante et fait écho au courroux de Zablo sur « la disparition ».
    C’est ce que j’appelle dans l’article  » la primauté laissée aux grands opérateurs historiques ».
    L’intervention publique et encore plus l’intervention des citoyens n’est tolérée que comme apport de subventions ou comme fourniture de travail temporaire sous-rémunéré ou gratuit (aller par exemple démarcher vos voisins pour qu’ils demandent à leur maire d’acheter tel produit de tel opérateur…)
    Que les collectivités locales, que de nouveaux acteurs, que des citoyens puissent jouer un rôle pérenne, puissent être compétents voire pire innovants et au horreur puissent à terme leur prendre une partie de leur parc et de leur rôle d’opérateur relève presque du « Blasphème ».
    Ils sous-investissent sur les infrastructures fixes, pourtant leur cœur historique de métier mais ne veulent surtout pas que de nouveaux acteurs viennent sur ces infrastructures. L’idéal étant que le contribuable paie sans avoir aucun retour, et sans s’engager dans des clauses de retour à meilleure fortune…
    Je rappelle le paradoxe : aucun argent du contribuable n’a été mis dans le réseau cuivre quand l’ancêtre de Orange était public, seulement des emprunts garantis et remboursements via les abonnements et communications. Maintenant qu’ils sont privés ils veulent corriger cela et que le contribuable finance du patrimoine privé, tout en évitant que cela puisse profiter à d’autres qu’à ceux déjà établis…
    Il est à noter aussi que de tout temps cette infra et les offres wholosales associées (offres de gros) sont la partie la plus rentable d’un opérateur intégré verticalement. Même si régulé aux coûts quand cette infra. est en monopole local, cela veut quant même dire d’être rémunéré à 10% sur 20 ou 40ans quand vous empruntez à 2 ou 3% sur 25ans.
    Principalement en ZMD et là où il n’y a pas de Coax, soit les 2/3 des foyers et la très très grande majorité du territoire en superficie, ces réseaux en fibre optique vont être rapidement (en quelques années) le passage obligé, et en monopole donc jusqu’aux derniers mètres, pour tous les services fixes et mobiles, dans les immeubles et sur la voie publique, pour les services et usages entre personnes, entre objets, pour concourir à la transition énergétique, au smart grids, à l’optimisation des transports et plus globalement ce réseau en fibre optique deviendra rapidement incontournable à toutes les autres infrastructures : eau, électricité, gaz, transport routier et signalisations routières, transport ferroviaire, transports en commun, éclairage public, vidéosurveillance, véhicules partagés ou autonomes (vélib, autolib, véhicules automatiques,…), réseaux logistique, etc.
    Ce réseau en fibre optique est souvent comparé dans son rôle stratégique et structurant pour la société à l’électricité, aux routes, aux voies ferrées, autant d’infrastructures où l’action publique a été fondamentale pour palier ou compléter les premières initiatives privées.
    Comme demandé à M. Benghozi j’aurais aimé au delà des sirènes de pleurs des historiques sur la baisse de leurs CA, cela soit étudié couche par couche. Par exemple qu’en est il sur plusieurs années du CA sur l’Infrastructure et de la marge générée. Pareil sur le marché des services où certes il décroit mais aussi parce qu’à coté le marché des services explosent mais ce CA et ces marges ne sont pas comptés dans le périmètre des Télécoms. Par ex les appli. sur smartphone permettant de s’échanger des messages, de la vidéo,… ne sont pas compté dans le marché des SMS par ex. Mais toute l’histoire de la société a été faite d’innovations destructrices. La bougie, les calèches, les chevaux, … ont laissé la place.
    Si les opérateurs historiques ne voient pas d’aller vers ces infras, vite, avec l’emprunt de longue durée, avec des offres de gros les plus attractives pour rentabiliser au mieux leurs investissements, je leur prédis un avenir sombre dans un monde extrêmement concurrentiel et dynamique.
    Je rappelle qu’avec le Coinvestissement n’importe quel acteur nouveau peut s’établir sur le marché au niveau de l’infra passive, peut demander des règlements de différents si la tarification est discriminatoire et non objective… Donc toute muraille érigée serait faussement rassurante et peut s’effondrer à sa base.

    Sur un tout autre point espérons que dans le cahier des charges MTHD sous le principe apparemment sain d’industrialiser on ne tue pas toute possibilité d’innovations.
    Je n’aurais pas ce sentiment si le régulateur, les gros historiques n’avaient pas fait une pression aussi forte pour éviter les offres activées, notamment fondamentales pour le marché Entreprise en France et en Europe, n’avaient pas produit des offres tarifaires sans commune mesure avec le cuivre et conduisant à des scénarios attentistes, et ne faisaient pas un tel lobbying pour attendre et encore attendre avec des solutions d’attente.

  12. Mais enfin ! Un réseau indépendant en rupture avec l’architecture hiérarchique héritée de Mathusalem, construit selon une architecture pair à pair en bénéficiant des ressources humaines et financières de ses utilisateurs produisant ainsi un bien commun dont ils sont copropriétaires, dont ils gèrent les capacités et dont ils produisent la gouvernance, etc, etc,… nous sommes bien placés pour savoir que cela pose un vrai problème social et culturel a priori (ce n’est pas moi qui le nierait) mais certainement pas a posteriori.

    Qu’est-ce qui imposerait la nécessité in fine de remettre ce bien à d’autres entités dont nous connaissons aujourd’hui la faillite ? Il continuerait simplement à être opéré dans les mêmes conditions de propriété et de gouvernance qui auraient présidé à sa construction.

    Je le répète, s’il y a bien un problème a priori il n’y a pour autant aucun problème a posteriori, bien au contraire.

  13. Pour information l’initiative et les travaux conduits sont réalisés sous la bannière de « Recommendations for Fibre Commons ». Le terme de Commons  » refers to resources accessible to all. It includes public goods such as public space, public education, health and related infrastructures to allow society to function. Reference to Wikipedia »
    Mais notre société hyper centralisée, hyper Jacobine (je suis un Girondin d’origine !) fera tout pour résister et ne pas voir cela s’ériger. Mais une fois fait elle trouvera à s’y adapter je n’ai pas de doute. Donc pas de problème a posteriori comme tu le dis Zablo, mais une métamorphose qui ne va pas de soi a priori.
    En cela il ne convient pas de parler de révolution technique mais bien de révolution sociétale, de métamorphose de la société en cours. Nous sommes face à un choix de société, où tous les citoyens peuvent agir.

  14. Remarque Joël (et je te suis reconnaissant) je suis passé à côté du grand malaise grâce à ta phrase : que de nouveaux acteurs, que des citoyens puissent jouer un rôle pérenne, puissent être compétents voire pire innovants et au horreur puissent à terme leur prendre une partie de leur parc et de leur rôle d’opérateur relève presque du « Blasphème ».

    Blasphème c’est le mot ! Et quand je dis que le seul problème si situe a priori c’est que les mesures de rétorsion contre les blasphémateurs sont suffisamment puissantes pour les empêcher de développer une pédagogie efficace.

    Pour reprendre la rhétorique d’un Nicolas Colin, je dirais que le blasphémateur qui trouvera un jour le moyen de faire alliance avec la multitude des usagers des télécoms Uberisera le secteur dans des proportions sans commune mesure avec les disruptions marketing à la Free. Une révolution sociétale ! Oui c’est sans aucun doute ce qu’il nous faut faire advenir 🙂

  15. Au quotidien, tout s’oppose aux déploiements en mode DIY. Aucune incitation. Aucune règle fixant des prix de redevance de réseaux passif (ou actif). Aucune AMO mutualisé, par exemple au niveau départemental… RIEN. Aucune imagination. Aucune expérimentation significative ou presque. Que des discours entre nous les amis. Et ceux qui ont tenté ne veulent visiblement pas en parler publiquement ! 6 demandes sans réponse pour Numericuss… A croire qu’ils sont encore tellement loin du but qu’ils mettent toute leur énergie à ramer. je les comprends.

    Les vrais projets FttX ZMD, en RIP notamment, ne devraient-ils pas comprendre un volet de ce type ? SI je refaisais Pau aujourd’hui, il y en aurait un avec un mix DIY / AMO publique ou assimilé / SIG coopératif / Solution de maintenance partagée… Oh les RIP réveillez-vous !

  16. Oui, il y a tant d’énergies, de compétences, de motivations, d’innovations dans la multitude, que des brèches dans ces murailles jacobines et conservatrices vont bien finir par arriver, car objectivement le système se tend de plus en plus en France comme en Europe et je ne le vois pas résister très longtemps. Il y aura d’autres Snowden, d’autres scandales, d’autres élections, d’autres crises, autant d’étincelles qui peuvent conduire à des avancées voire des ruptures.
    C’est tout ce que j’ai résumé dans mes présentations intitulées « Europe Numérique : de l’Age du Cuivre à celui des Lumières ? »

    Quand on voit tout ce gâchis, nous sommes surement, mes amis, tous affligés, désespérés, … Mais c’est surement le prix à payer pour ne pas se complaire dans une sorte de « servitude volontaire », et essayer de faire bouger les choses pour plus de Commons.

    Pour ma part depuis que j’ai quitté Orange puis l’ARCEP, j’essaie de produire des contributions détaillées, qui contredisent les idées reçues sur des bases objectives, qui montrent que d’autres choix sont possibles pour nos dinosaures que l’extinction,…
    Dont dernièrement des contributions sur les scénarios efficients pour toute la société de migration du cuivre vers la fibre, et des approches « rénovées » pour évaluer un prix de location rentable de la fibre optique dans un contexte de concurrence, d’accès à de la dette de long terme à faible taux, du coinvestissement, d’une analyse différentielle et concurrentielle entre rester sur cuivre et migrer…

    Si juste 1% de l’argent et des compétences dépensées pour ces solutions d’attente étaient orientées vers ces expérimentations et solutions dynamiques et efficientes… une sorte de droit au Blasphème! nous aurions déjà fait un grand pas dans la fissuration de l’édifice, pour libérer la voie à un âge des Lumières.

  17. Votons pour le 1% créations expérimentales THD en ZMD en effet… Mais comme le vote ne sert pas toujours à grand chose versus promesses effectivement tenues, je verrai bien monter une entreprise en mode coopératif Scic sur ce sujet…

  18. Ah mais dans cette hypothèse, Jean-Pierre, l’Association Syndicale BYO.CAMP se fera une joie de prendre une participation significative dans la coopérative et dans la catégorie bénéficiaires.

    Je rappelle que celle-ci a pour objet : la valorisation des biens immobiliers et fonciers de ses membres par l’aménagement entre ceux-ci de réseaux intégrant connaissances et savoir-faire, matériels et logiciels, applications et services d’intérêt collectif et qu’elle s’autorise en outre toute opération liée à son objet ou à tout patrimoine social ce qui semble être le cas ;-).

  19. pourquoi pas… cela suppose que l’on monte déjà une première organisation syndicale ou coopérative ce à quoi je réfléchis. Elle existe « ton » asso ?

  20. Elle existe sous forme de promesse entre ses fondateurs, elle est donc en gestation car la véritable question qui se pose encore aujourd’hui est plutôt d’ordre tactique lié à deux paramètres :

    1) Les textes qui la régissent ne l’obligeant pas à se constituer sur un périmètre déterminé d’un seul tenant et sans enclave, son périmètre d’action est sans limite a priori et se développera à partir du siège social.

    2) À l’issue d’un premier exercice dans le régime d’association syndicale libre (ASL) la transformation en association syndicale autorisée (ASA), établissement public à caractère administratif et à champ d’action international, sera engagée donnant lieu à enquête publique sans création d’une nouvelle personne morale.

    Ce dernier point suppose un rattachement à une commune, un groupement de communes, un département, une région voire une collectivité d’outre-mer. L’identité de l’administration de rattachement ne détermine pas la zone géographique d’action de l’établissement public (un établissement public local peut avoir un champ d’action à l’échelle nationale, voire internationale, au moins indirectement ce qui est le cas ici).

    Pour autant ce choix tactique a une portée et une utilité politique évidente même si on peut le considérer comme étant en partie de l’ordre du symbole. Pour l’heure mes différentes tentatives d’approche se sont toutes soldées par des échecs. J’ai fait connaître cette hypothèse à différents niveaux mais je pense que le responsable politique qui se mouillera (ne serait-ce que du bout d’un doigt de pied) dans cette affaire est un oiseau rare sinon un poisson volant !

    Je devrais peut-être mettre une petite annonce dans le Bon Coin…

  21. Désenclaver une ComCom c’est hypra simple : un pylône, 3 x antenne 120°, une fibre optique au cul de tout ça et ça roule : 15 ou 20 K€ suffisent pour plusieurs dizaines de KM², que ce soit pour le particulier ou les entreprises…

  22. Pas faux. Encore quand même faut-il trouver la fibre dispo, à prix correct, avec du transit pas vendu à des prix de folie, avec un opérateur pro… Encore faut il aussi faire accepter le pylône aux voisins… Finalement on peut quand même enlever HYPRA dans hypra simple non ? 🙂

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