Pour réussir l’aménagement numérique de tous les territoires : l’Appel de Valence

Voici le texte de l’appel de Valence lancé le 3 juillet 2012 à l’occasion de la journée CREDO – ARUFOG, deux associations oeuvrant pour le développement de la fibre optique en France. Nous le reproduisons in extenso afin de relancer le débat. A noter notamment le grande réserves formulées sur le VDSL2 et, enfin, des propositions concrètes de coopérations entre RIP. C’est l’une des clés à toute avancée, j’essaie de le démontrer dans cet ouvrage à paraître, et l’on ne peut que se réjouir de voir les élus opérationnaliser cette piste. Autres analyses et commentaires à suivre mais visiblement les choses avancent coté Collectivités depuis Ruralitic 2011, en attendant de plus amples informations émanant de l’Etat.

Les travaux menés tout au long de la journée par les 240 participants (industriels, installateurs, consultants, collectivités, opérateurs) à ce séminaire montrent l’urgence d’une prise de conscience nationale des enjeux induits par le déploiement rapide du très haut débit par la fibre optique (FTTH) pour la compétitivité de notre pays, de ses territoires et de ses acteurs économiques.

L’étude Mc Kinsey réalisée pour le Gouvernement fin 2010 a mis en avant la perspective de la création nette de 700 000 emplois en 15 ans par la filière du numérique. Ce développement est conditionné par la présence d’une infrastructure performante qui irrigue tous les territoires en fibre optique.

Plusieurs signaux inquiétants sont perçus sur nos territoires :

  • Le déploiement du FTTH n’est pas, en France, à la hauteur des ambitions affichées sur le plan politique. Avec 140 000 prises FTTH au 3e trimestre 2011, 125 000 au 4e trimestre, 105 000 au 1er trimestre 2012, les opérateurs réduisent actuellement leurs investissements. Un déploiement conforme aux engagements des opérateurs (zone très denses, zone AMII) nécessiterait 7 fois plus d’investissement qu’actuellement, soit trois millions de prises par an.
  • L’annonce de la commercialisation en 2013 du VDSL2 – et donc de la poursuite de la pérennisation du réseau téléphonique filaire en cuivre – conforte l’idée que les opérateurs retardent le FTTH au profit de la rente du cuivre. Cette technologie contribuera à l’accroissement de la fracture numérique : toujours plus pour ceux qui ont déjà un bon service et rien de plus pour ceux qui n’ont rien.
  • La couverture mobile 4G est présentée comme une solution alternative à la couverture filaire FTTH sur les zones rurales. Or, l’Union européenne dans son projet de lignes directrices pour le haut débit ne la retient pas comme une solution de très haut débit. De plus, les obligations liées à l’attribution des fréquences ne répondent pas de manière satisfaisante aux attentes des territoires en termes de délais, d’engagements de couverture et de niveaux de service.

Ces signaux ne donnent pas l’impulsion dynamique nécessaire à la mise en œuvre d’un écosystème créateur des richesses et des emplois de demain. L’enjeu de l’aménagement numérique sur tous les territoires passe par la réalisation d’une infrastructure en fibre optique.

A ce jour, nous constatons que les seuls chantiers significatifs de déploiement de la fibre optique à l’abonné sont le fait de réseaux d’initiative publique portés par des collectivités locales au titre d’un service public qui repose sur la péréquation territoriale et l’objectif d’une couverture totale. Ce sont plus de 2 millions de prises dont la construction est engagée : la dynamique est publique !

Les élus présents aujourd’hui à Valence, porteurs de réseaux d’initiative publique de communications électroniques parmi les plus importants en France, refusent de transiger sur les conditions de mise en place de cette infrastructure essentielle.Ils lancent l’Appel de Valence, démarche volontariste et constructive, pour réussir l’aménagement numérique de tous les territoires.

Hervé RASCLARD, Président du Syndicat mixte Ardèche Drôme Numérique, Philippe LEROY, Sénateur de la Moselle, co-auteur d’une proposition parlementaire de loi2 sur l’aménagement numérique, et Alain LAGARDE, Président du Syndicat mixte Dorsal (Limousin) appellent ainsi à une modification profonde des orientations du programme national très haut débit par une stratégie ambitieuse au plus haut niveau de l’Etat.Pour les élus présents à Valence, deux choix se présentent aujourd’hui :

  • Conserver en l’état le Programme national Très haut débit (PNTHD) qui privilégie l’investissement privé sur les zones les plus rentables, soit 7 Md€ annoncés sur les 10 prochaines années, et limite l’action des collectivités locales aux seules zones non rentables, sans effet de levier.
  • Bâtir un nouveau partenariat public-privé, autour de 3 axes :
  1. Réaffirmer le choix de la fibre pour tous, sur tous les territoires.
  2. Assurer un pilotage public national fort :
  • Un pilotage stratégique Etat-collectivités afin de réussir le défi de l’aménagement numérique de tous les territoires,
  • Engager la création d’une véritable filière performante pour le déploiement de ce nouveau réseau, à la fois sur le plan de la formation, de la création d’emploi et de la production industrielle. 15 000 à 20 000 emplois seront nécessaires pour le seul déploiement du réseau.

3. Garantir des financements pérennes :

  • Créer les conditions d’un effet de levier financier qui garantira, au travers de la commande publique, l’investissement privé nécessaire sur la durée pour atteindre les 25 Md€ nécessaires,
  • Permettre l’abondement du volet B du Programme Investissements d’avenir (FSN), dédié aux collectivités, du milliard d’euros non utilisé par les opérateurs privés sur le volet A,
  • Organiser le basculement du modèle économique du secteur, du réseau cuivre vers le réseau fibre, en fixant une date butoir.

Sept propositions concrètes ont été formulées en appui à cet appel.

PROPOSITION 1 Redéfinir le modèle national de déploiement du FTTH

La redéfinition du modèle national de déploiement de cette nouvelle infrastructure essentielle doit être l’un des premiers chantiers à engager par le nouveau Gouvernement. Ce plan doit enfin bénéficier d’un pilotage stratégique fort de l’Etat en association étroite avec les élus du Parlement et des collectivités. Les priorités de déploiement du FTTH ne peuvent pas être imposées unilatéralement par les seuls opérateurs issus de l’ADSL

PROPOSITION 2 Intégrer prioritairement l’intervention publique

Ce modèle doit intégrer prioritairement l’intervention publique en plaçant les collectivités à égalité avec les opérateurs. Le très haut débit doit devenir un service d’intérêt économique général (SIEG) au sens de l’Union européenne, soit un véritable service public. Les collectivités ont démontré leur capacité à associer financements publics et financements privés sur leurs réseaux d’initiative publique. Elles seront à même de susciter l’intérêt d’investisseurs de long terme sur une infrastructure essentielle qui a vocation à supporter le développement de l’économie numérique.

PROPOSITION 3 – Instaurer rapidement un cadre plus favorable à la mise en œuvre du très haut débit en France

La nécessité d’une inscription rapide à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale de la proposition de loi Maurey- Leroy votée en première lecture au Sénat «visant à assurer l’aménagement numérique du territoire» est rappelée. Ce texte permettra d’instaurer rapidement un cadre plus favorable à la mise en œuvre du très haut débit en France avec notamment :

  • L’obligation du basculement du réseau filaire «cuivre» vers le réseau filaire «fibre». Une date butoir, à l’image de celle mise en place pour la TNT, permettrait de conforter le modèle économique du nouveau réseau.
  • Un fonds de péréquation national, pérenne sur la durée nécessaire de déploiement, qui pourrait être alimenté par les ressources produites par le réseau cuivre. Parallèlement, l’Etat doit réaffecter le milliard d’euros du volet A, non sollicité par les opérateurs dans le cadre du Programme Investissements d’avenir (FSN), au profit du volet B dédié aux collectivités avec un réel souci de promouvoir une péréquation territoriale.

 PROPOSITION 4 – Une meilleure maîtrise des évolutions de la boucle locale cuivre

Une meilleure maîtrise des évolutions de la boucle locale cuivre qui pourraient nuire au modèle économique du FTTH. A ce titre, l’annonce de l’introduction du VDSL2 en 2013 (100 Mbps sur 1 000 m) risque de repousser encore la perspective de l’accès de notre pays aux réseaux les plus porteurs de création de richesses.

PROPOSITION 5 – Créer les conditions d’une plateforme de commercialisation de l’offre de prises publiques

Une réflexion doit être lancée afin de créer les conditions d’une plateforme de commercialisation de l’offre de prises publiques. L’objectif est d’atteindre un volume critique de marché accessible aux opérateurs commerciaux.

Soucieuses de rester dans leur rôle d’opérateur d’opérateurs, les collectivités doivent peser dans la définition du modèle technico-économique national de déploiement de la fibre, d’égal à égal avec les grands opérateurs de services, et proposer un modèle dynamique plus ouvert aux opérateurs nouveaux entrants, bâti sur des offres activées. Cette démarche soit s’appuyer sur les associations de collectivités agissant dans le domaine.

PROPOSITION 6 – Soutenir la démarche Collectif Référentiel Fibre Commun (RFC)

Les élus présents à Valence soutiennent la démarche «Collectif Référentiel Fibre Commun (RFC)» initiée par l’Institut Mines-Telecom et l’ARCEP et appellent à une mobilisation de tous. Ce référentiel national doit permettre d’uniformiser les ingénieries de déploiement de la fibre ainsi que les process d’exploitation et de maintenance de ces réseaux. La bonne coordination des systèmes d’information des propriétaires, exploitants et opérateurs usagers de ces réseaux sera essentielle dans le succès de ce déploiement. Ils ont souligné l’importance des travaux réalisés par le CREDO pour l’établissement de ce référentiel.

PROPOSITION 7 – Mettre en oeuvre un plan de formation d’ampleur nationale pour acccompagner les déploiements à venir

Un autre grand chantier attend les industriels et les permettra de nombreuses créations d’emplois non- collectivités, celui de la formation des acteurs aux délocalisables sur la durée de ce déploiement. Le coût métiers du déploiement de la fibre optique. Les élus prévisionnel et le planning du déploiement du FTTH ont rappelé la nécessité de mettre en œuvre un plan pourraient être affectés si le secteur industriel et les de formation d’ampleur nationale pour accompagner installateurs n’arrivaient pas à répondre à la demande. les déploiements à venir. Ce grand chantier de 25 Md€ L’action de l’ARUFOG doit être soutenue en ce sens.

20 commentaires sur “Pour réussir l’aménagement numérique de tous les territoires : l’Appel de Valence

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  1. Je me permets d’ajouter 2 propositions, que je placerais en position 7 et 8 (la 7 actuelle devenant 9) :

    Proposition 7 – FAVORISER LE CO-FINANCEMENT ET LA MUTUALISATION DES INFRASTRUCTURES PAR/POUR DES ACTEURS AUTRES QUE PURS-TELECOMS
    Par exemple Régies Municipales d’Electricité, Syndicats des Eaux, etc.

    Proposition 8 – DEVELOPPER DES SOLUTIONS TECHNIQUES VERITABLEMENT ADAPTEES AU #FTTH MASSIF
    Ces solutions devront faire table-rase des techniques ancestrales employées aujourd’hui et dérivées des réseaux longue-distance, afin de permettre l’émergence d’une nouvelle industrie française des télécommunications, prenant en compte l’environnement socio-économique actuel et futur : manque de main-d’oeuvre qualifiée, manque de ressources financières, etc.

    Nota : étant par nature un Mousquetaire, je me mets ici à la disposition du Roi pour l’aider à mettre en place sa politique de développement territorial…

  2. Je vote pour. je propose d’ailleurs que les non élus que nous sommes se risquent aussi à lister leurs propres propositions pour enrichir le logiciel de décision THD. Qu’en pensez- vous ? A minima cela nous ferait une plateforme commune pour avancer.

  3. Déclarer que le public et le privé doivent trouver des dizaines de milliards d’euros pour faire des grands travaux, alors qu’aucun n’a réellement le début de ces euros dans les poches me semble complètement irréaliste.
    La rentabilité (tant privée que publique au sens de la cour des comptes) semble très douteuse: quelques centaines de milliers d’euros dépensé par emploi créé [NB: Tous les emplois de la filière numérique ne sont pas lié au FTTH, loin de là]. L’intérêt public d’une telle idée me semble donc douteux.

    Je signalerai aussi que ce n’est pas en obligeant les utilisateurs d’Internet à payer une taxe que vous les convaincrez d’utiliser la fibre, alors qu’actuellement, même avec des offres commerciales à peine plus chères, ils n’en veulent pas vraiment. Cela ne fera qu’aggraver la fracture entre les personnes prêtes à payer pour un abonnement fixe et celles qui jetteront tous les téléphones fixes qu’ils ont avec l’abonnement à la clef et la taxe correspondante, pour ne garder que des mobiles (il ne faut pas oublier cette concurrence aussi, surtout vu le goût nettement prononcé pour le mobile de nombre d’utilisateurs).

    En effet, avec l’arrivée de la téléphonie mobile un peu avant 2000, le taux d’équipement en téléphonie fixe a baissé sauf depuis 2005 où l’ADSL largement diffusé et peu cher a fait remonté ce taux avec la mode des box [Page 4]. On voit par contre que quasiment tout le monde à au moins un type de téléphonie [page 5].

    Cliquer pour accéder à slides-cp-credoc-2010-101210.pdf

    Les estimations (type McKinley, Gartner et autres) d’augmentation de trafic mobile donne nettement l’avantage à celui-ci sur l’accès par ordinateur. Depuis l’arrivée des smartphones, il suffit de regarder l’utilisation qu’en font les personnes pour voir la concurrence qu’ils font aux ordinateurs, même s’il n’est pas encore clair si les tablettes accèderont plus à Internet via les réseaux fixes (Wi-Fi) ou mobiles (3G).
    http://www.generation-nt.com/ventes-ordinateurs-france-europe-baisse-actualite-1538241.html
    Or sans appareil clairement défini justifiant d’un accès domestique à Internet, cela peut être très mauvais pour le taux d’équipement.

    N’oubliez pas que si vous souhaitez augmenter le coût de l’ADSL pour financer le FTTH, cela peut donc avoir comme seul résultat de faire chuter l’assiette de votre financement. Les économies liées à la crise ne concernent pas que l’état ou les entreprises, mais aussi les particuliers qui voient fleurir les taxes. Le budget téléphonie est l’un des budgets domestiques qui a le plus augmenté ces dernières années et sur lequel les individus pourraient être tenté de faire des choix (il suffit de voir le succès de Free Mobile): ma vision des individus me montre que la grande majorité a un attachement beaucoup plus viscéral au téléphone mobile qu’au téléphone fixe, donc le choix ne sera clairement pas en faveur de l’ADSL si son prix doit augmenter!

    Le problème du financement du FTTH ne se reposerait alors pas dans ce cas, il est vrai, car l’accès domestique à Internet réduirait massivement, donc le FTTH n’aurait plus lieu d’être (juste une couverture en fibre suffisante pour desservir les antennes de téléphonie mobile, les entreprises et quelques particuliers adeptes).

  4. Vu le goût pour le tethering et le fort intérêt pour son support par Android et cie, cela peut d’ailleurs devenir le mode privilégié d’accès à Internet des tablettes (à voir).

    NB (cas typique de tethering pour explication): la tablette se connecte en WiFi sur le téléphone mobile qui transmet en 3G les échanges de données à l’antenne relais de l’opérateur (puis réseau fibré classique).

  5. Pour moi la différence majeure est une échelle de temps: La téléphonie mobile, en *pratique*, en 3G dans certains quartier de grandes villes en pleine nuit avec le vent dans le dos, on atteint les performances (en débit & latence) d’une ligne ADSL moyenne, avec en bonus une IP privée, un proxy filtrant et des quotas.

    Or il suffit de voir la vitesse d’évolution des infrastructures: Il y a 10 ans on était débit GSM (9600kbps) , les plus chanceux en Edge.
    Depuis on a vécu la 3G, la 3G+, et la 4G est pour bientôt. Avec à chaque fois des investissements tant dans les terminaux que sur le réseau opérateur.
    Au contraire un réseau « landline » est largement plus cher à poser, mais il l’est pour très , très longtemps (Le réseau cuivre c’est pas loin de 60 années, et l’objectif pour un réseau FTTH c’est au moins autant., en tenant compte de la bande passante optique de plusieurs terahertz)

    Mais tu mets le doigt sur un problème majeur: Tant que 99% des gens verront la fibre simplement une « super-ADSL » ils n’auront aucun intérêt à y passer.
    Aujourd’hui, il n’y a pas d’applications qui exploitent vraiment les possibilités de fibre, et nos opérateurs qui la brident à 100Mbps ne sont pas inventif sur le sujet, là ou pourtant les exemples existent outre-atlantique (comme à Chattanooga)

  6. Les opérateur ne vont probablement pas débrider le débit de la fibre, car la consommation de données a un coût aussi via son transport jusqu’au serveur correspondant (fibres inter-cités, inter-pays, inter-continentales). Le coût de ces infrastructures est loin d’être négligeable et les gros hébergeurs/fournisseurs de contenus type Google ne veulent pas vraiment payer pour cela. On voit déjà pas mal d’opérateurs européens passer à une facturation liée à la fois au volume de données et à la ligne, car cela reflète mieux la structure de coût.

    Je doute que les applications foisonnent si énormément, car le smartphone devient un terminal de référence dans tous les pays et toutes les couches sociales et c’est probablement le seul terminal actuellement à objectif mondial (un pays qui n’avait pas de réseau cuivre jusqu’à l’abonné n’en déploie pas nécessairement, il peut ne déployer qu’un réseau mobile). Tout service dédié à des terminaux plus spécifiques par exemple en requérant des très haut débits sera donc nettement plus confidentielle avec le financement associé plus restreint.

    De facto, les intérêts actuels d’augmenter le débit, pour le ressenti de la plupart des utilisateurs, sont, à mon avis, surtout sur le débit montant (visio-conférence de meilleure qualité, sauvegarde distante plus rapide). Au delà de cela, je ne suis pas encore vraiment convaincu. La création de modèles économiques valides et pérennes sur des services très haut débit laissent à désirer. Par exemple, tous les domaines liés à la téléphonie, visio-conférence, risquent de subir un choc dans leur rentabilité dès l’an prochain avec le déploiement dans tous les navigateurs web du standard en cours WebRTC (cela sera brutal et sans doute vite adopté, vu que Microsoft semble migrer Skype dans Internet Explorer sur WebRTC). Cela impactera sans doute la rentabilité des opérateurs et donc leur marge de manœuvres pour investir.

  7. Je suis d’accord sur les différences d’échelle de temps entre les types de réseau jusqu’à l’abonné, mais cela reflète aussi le problème: comment trouver un modèle économique qui soit assez riche et pérenne pour permettre d’extraire régulièrement sur des dizaines d’années le remboursement d’un réseau de fibre optique (question valide tout autant pour l’état que pour les entreprises). Actuellement la visibilité économique dans un secteur évoluant assez rapidement, n’est clairement pas aussi distante.

    De plus, le risque du double réseau (fixe et mobile) est un écroulement rapide du taux d’utilisation de l’un (typiquement le fixe). Il suffit de voir qu’avec l’arrivée du train, le réseau de canaux n’a plus été aussi entretenu; avec l’arrivée de l’automobile, c’est le réseau de de train qui a été abandonné, etc.. L’être humain a une grande faculté à prendre des habitudes et donc à ne sélectionner qu’une seule solution pour un problème donné.

    Pour beaucoup d’utilisateurs qui adorent leur mobile et n’aiment pas l’ordinateur trop complexe, qui ont le choix entre deux offres dites illimitées (une à 19,90€ en mobile et une à 29,90€ en fixe, si l’on prend les tarifs de Free) et qui en ont marre de payer plein d’argent à des opérateurs; est-ce que le choix ne sera pas vite fait?
    Est-ce que le que Home Cinema, les consoles de jeux ou l’Internet domestique soutiendront assez les réseaux fixes: ce n’est pas sûr, car ils ont la concurrence du cinéma normal, des salles de jeux en réseau, des cybercafés. Or peu d’utilisateurs utilisent tout cela à la fois et jugeront donc aussi rentables d’avoir un abonnement domestique, surtout que les versions non domestiques se font en groupe (ce qui est une incitation sociale très forte à préférer cette version).

    Je crois que pour maintenir le système du double abonnement (fixe domestique et mobile par individu) et donc ses marges de manœuvres financières, les opérateurs risquent plutôt de devoir massivement baisser les prix de l’abonnement fixe, donc la question de déployer un nouveau réseau jusqu’à un abonné (qui risque de ne pas s’abonner à la fibre quand elle arrivera chez lui, pour ne garder que le mobile) n’est clairement pas financièrement assurée. Le choix de rester au maximum sur le réseau cuivre est donc logique.

    Par contre, la partie mobile des opérateurs peut aider un peu, dans la limite du raisonnable, le déploiement fixe. En effet, pour un opérateur, si le système du double abonnement est pérenne, il y a des économies par la bascule de données des réseaux mobiles sur les réseaux fixes (via Wi-Fi et EAP-SIM). Par conséquent si beaucoup d’utilisateurs ont un abonnement fixe avec un Wi-Fi public, il peut être jugé valide par les opérateurs mobiles de financer la fibre optique jusqu’à 100 000 armoires de rue (avec des millions de hotspots domestiques WiFi) plutôt que déployer 100 000 antennes de téléphonie mobile avec leur propre fibre optique, car on économise des risques administratifs, légaux et sanitaires. Cela ne paiera par contre pas le déploiement de la fibre directement à des dizaines de millions de foyers.

    En conclusion: je crois que soit le prix de l’abonnement fixe soit le nombre d’abonnements fixes baissera. Dans les deux cas, le chiffre d’affaires baisse clairement et donc les possibilités d’investissement.

  8. « Les opérateur ne vont probablement pas débrider le débit de la fibre » .
    « Je doute que les applications foisonnent si énormément ».

    Alors, dans ce cas-là, je suis 100% d’accord avec vous:
    Arrêtons tout investissements *immédiatement*, ça ne sert à rien de changer quoique ce soit.

    Les villages de campagne (et une bonne partie des gens des villes de banlieues un peu éparses) resteront durablement en 512k (sur ce sujet, le VDSL n’apporte aucune solution, mais comme de toute façon il n’y a aucun nouvel usage et aucun intérêt à avoir du débit, ça n’est pas un problème).
    De toute façon, quand ces bouseux de campagnard mourront on aura plus besoin d’aller maintenir les lignes de cuivre dans les campagnes, plus personne n’y habitera de toute façon. Les gens normaux habitent forcément dans les grandes villes tout le monde le sait, a part quelques excentriques anarco-gauchiste dans leurs yourtes qui refusent même les148 chaînes d’orange (y compris le foot !!)

    J’vois vraiment pas pourquoi on investirais des milliards dans des fibres, des armoires, des relais mobile quand équiper les centres des 5 grande villes suffit largement à consulter Facebook sur son mobile.

  9. Pour être moins ironique, j’ajouterais juste que TOUTE votre démonstration repose sur une hypothèse: Que ce soit les FAI actuels, nationaux, qui équipent et financent le réseau depuis les trous dans le sol jusqu’à la box & les services.
    Et ce de manière unilatérale, sans JAMAIS impliquer les citoyens autrement qu’en les considérant exclusivement comme des consommateurs des offres de service que ces mêmes FAI auront la magnanimité d’inventer pour eux.
    Le service public quant à lui étant essentiellement là financer les 5 FAI nationaux et éviter que ceux-ci réalisent des pertes, au moins sur la partie aménagement du territoire.

    Même si cette vision des choses est celle de l’ARCEP et du gouvernement (quoique en fait, pour ces derniers, on ne sais pas vraiment ce qu’ils en pensent…), ce n’est pas forcément cette vision qui est défendue ni sur ce blog, ni par les signataires de l’appel de Valence.

  10. Comme dit précédemment, je suis pour que l’ARCEP fasse en sorte que le fibrage des armoires de rue soit national, donnant donc un ADSL de bonne qualité dans les campagnes car plus proche de l’abonné.
    cf. la réponse précédente à la même question de Jean-Pierre Jambes:
    https://numericuss.com/2012/06/28/le-scandale-de-lautorisation-du-vdsl2-la-fin-du-fttx-en-france-avant-meme-quil-est-vraiment-demarre/#comment-1350

    Ensuite, vous n’y pouvez rien au fait qu’augmenter le volume de données représente un coût majeur pour l’opérateur en interconnexions nationales et internationales qu’il faudra bien qu’il facture ce coût au client. Tout client peut avoir de la fibre à 1 gigabit/seconde, mais le prix n’est pas du tout du niveau de 30€/mois (même à Paris intra-muros chez les opérateurs publics, type RENATER pour l’éducation). Par conséquent, il n’y a de facto pas de client individuel qui prendra une fibre optique à 1 gigabit/seconde, donc les opérateurs ne débrident pas le débit et proposent des forfaits à des prix raisonnables mais à débit limité (actuellement), et peut-être bientôt, vu les autres pays européens à débit illimité mais volume de données limités comme actuellement sur les offres mobiles Internet.

    Finalement, l’ambiance sur ce blog étant visiblement nauséabonde et non propre à la discussion technique de fond, je m’en vais:
    > De toute façon, quand ces bouseux de campagnard mourront […] Les gens normaux habitent forcément dans les grandes villes […]
    C’est triste car la plupart des personnes que je connais sont en province ou en campagne; elles savent être simplement polies et discuter d’un problème sur le fond sans hurler à la discrimination anti-campagne à chaque fois qu’un caprice insensé ne peut être réalisé, tandis que des solutions moins couteuses peuvent améliorer nettement une situation problématique et au moins voir le jour au lieu d’être des utopies irréalistes.

  11. Oui, c’est une hypothèse que les FAI financent la fibre optique.
    Non, même si l’état finance quelques situations particulières, cela ne changera pas grand chose, car l’état doit aussi y voir sa rentabilité: il a plein de projets d’avenir qui peuvent créer des emplois et du mieux-vivre dans les énergies renouvelables, les transports, la robotique, la santé, les services à la personnes, la petite enfance et plein d’autres domaines en dehors du numérique et il doit aussi faire ses choix selon la rentabilité publique, qui pour le moment laisse nettement à désirer pour le numérique (cf. premier message de ce thread).

    > ce n’est pas forcément cette vision qui est défendue ni sur ce blog, ni par les signataires de l’appel de Valence.
    C’est bien un problème, car beaucoup trop partisan. L’absence cruelle de réponse technique de qualité et les deux attaques brutales et dénuées d’intérêt à mes commentaires me font décamper de ce blog, car il n’est pire sourd que celui qui ne veut pas entendre, ni même réellement discuter sur le fond!

  12. (Dernier point après j’arrête, promis, concernant la structure des coûts réseau)

    Je ne suis pas d’accord pour dire que la facturation en volume reflète les coûts effectifs: Un routeur n’a pas un « compteur de paquets », qui fait qu’il s’arrête de marcher après 10 milliards de paquets transférés.
    Cette facturation en volume est simplement une convention, passée par les opérateurs de transit, de facturer le volume au 95ème percentile, et qui provient du monde des telco des années 60, qui permettent à des grosses boites d’engranger des profits à partir d’un investissement fixe (et important) au départ, et qui présente en plus « l’avantage » de valoriser la saturation des équipements en cas de monopole local.
    Il existe pourtant d’autres types de contrats, comme le peering payant, donc un abonnement fixe pour un port donné, complètement indépendant du trafic réel.

    Les opérateurs dont on parle, la facturation du débit « transit » ça représente un pouillème de leurs coûts, loin derrière les coûts, certes importants, des investissements fixes: armoires réseaux, tranchés,….. qui sont bien plus dépendant de la géographie du réseau et du nombre d’abonné que du trafic effectif.
    Les opérateurs européens qui passent en trafic « volume » ont surtout atteints une taille critique qui leur permet de tirer une rente de leurs investissements malgré le mécontentement de leurs utilisateurs (surtout si ils se sont entendus avec leurs 3 « concurrents » pour que tout le monde fasse pareil au même moment).

    La seule exception que je vois à ça ce sont les « opérateurs satellites » qui en fait ne sont que des revendeurs d’Eutelsat, lequel leur facture le trafic à 40€/megabit – sans aucune autre possibilité d’accès à l’abonné. Ces opérateurs, oui, ils n’ont pas le choix et sont obligé soit de faire des quotas, soit de faire une facturation au débit. Mais là c’est Eutelsat qui fait son beurre, c’est tout.

  13. Je m’excuse platement de mon (mes) commentaires ci-dessus qui vous ont choquée – j’admets que cette tentative d’humour caricaturale tombait à plat, et je ne veux pas, surtout pas, que vous quittiez ce blog de mon fait alors que je pense par ailleurs vos critiques absolument constructive (et c’est parfaitement exact que je ne l’ai pas précisé, dans ma tentative d’humour que je regrette à présent).

    Je n’interviendrais plus sur ces sujets et je vous demande humblement de bien vouloir accepter mes excuses pour ces attaques malvenues.
    Je laisserais désormais à d’autre le soin de répondre.

  14. > Je m’excuse platement de mon (mes) commentaires ci-dessus qui vous ont choqué […]
    Ne vous flagellez pas trop (« L’excès de la flatterie tient lieu d’offense. ») et ayez de la fierté, car honnêtement vous avez au moins donné des arguments. L’autre commentaire [1] auquel je faisais référence et qui me fait partir de ce blog venait d’une autre personne que vous. Je n’ai rien contre les phrases caricaturales, même si un blog est probablement un assez mauvais support pour cela (car il faut souvent le support d’une discussion pour valider ou non la pertinence de la caricature pour le sujet traité).
    Par contre, ce qui me choque notoirement est le misérabilisme (type: « Je suis un pauvre campagnard victime des méchants bourgeois citadins, donc il faut que vous fassiez tout ce que je veux »). Respectez vous vous-même si vous voulez être respectés!

    Ce en quoi, vous avez malheureusement parfaitement raison, à mon avis, est l’objet du blog et la cause fondamentale de mon départ: le soutien inconditionnel au FTTH, lequel n’a rien à voir, pour moi, avec ce que je souhaiterais, c’est-à-dire l’augmentation des débits filaires (tant en ville qu’en campagne).

    Soutenir la montée en débit, suppose déjà maintenir un réseau filaire, ce qui est loin d’être clair (par exemple encore 275 000 abonnés en moins au premier trimestre) [2]. Le nombre d’abonnés fixe a baissé avec le mobile de 2000 à 2006, puis remonté avec les box pas chères de 2006 à 2010 et baisse depuis deux ans avec l’arrivée des smartphones.

    Pourquoi quelqu’un changeant régulièrement de logement et/ou qui adore son smartphone prendrait un abonnement fixe utilisable à domicile à 30€/mois alors qu’il a un abonnement mobile utilisable partout et dit illimité à 20€/mois (question que je vous conseille de poser aux étudiants, commerciaux, etc.)? Si l’abonnement fixe ne descend pas aussi à 20€/mois (donc, entre autres, en économisant sur les investissements), il perdra des abonnés clairement et le réseau régressera.

    Agir pour augmenter le débit partout en France signifierait aussi bien intégrer ensemble les réseaux fixes et mobile pour diminuer les coûts spécifiques d’un réseau: par exemple, amener la fibre optique jusqu’à une armoire de rue se justifie bien mieux s’il y a un pylône à côté de l’armoire de rue et des antennes de téléphonie mobile en haut du pylône (cela est un moyen concret à mon avis d’influencer les opérateurs pour fibrer l’armoire de rue et mettre le VDSL2 dedans, s’il y a assez d’abonnés à moins de 500 mètres ou l’ADSL2+ s’il y a assez d’abonnés à moins de 2km).

    Si les demandes sont trop irréalistes, le réseau filaire à domicile risque de connaître le même sort face au réseau mobile que le train a connu face à la voiture dans les années 1960-2000 (lente régression et fermeture progressive de tronçons), faute de la simple maintenance de l’existant et de la mode de l’ultra-rapide qui a fait n’investir que dans la grande vitesse (les grandes villes ont certes été desservies par les TGV, mais les campagnes ont perdu leurs trains locaux).

    N’hésitez pas à continuer d’intervenir, vu que je ne reste pas.
    Cordialement,

    [1]: https://numericuss.com/2012/06/28/le-scandale-de-lautorisation-du-vdsl2-la-fin-du-fttx-en-france-avant-meme-quil-est-vraiment-demarre/#comment-1343
    [2]: http://www.arcep.fr/fileadmin/reprise/observatoire/1-2012/obs-marche-t1-2012.pdf

  15. « Soutien inconditionnel au FttH« sonne comme une de ces formules aussi définitives que, peut-être, trop vite écrites. Je ne crois pas en outre que là soit la ligne éditoriale de ce blog, ni surtout la philosophie de tous ceux qui défendent un aménagement numérique à la fois à la mesure des temps à venir et capable d’apporter du « plus » à tous partout, un »plus » information et surtout en plus grande capacité à faire et à inventer emplois, entreprises et services. Dans votre entrée « augmentation des débits filaires« , peut-être, est-ce finalement quelque chose comme cela que vous recherchez ? Et dans nos graals respectifs, en oubliant comme vous tout forme de misérabilisme, le but de tous ceux qui écrivent sur ces sujets est sans doute d’apprendre un peu mieux à comprendre les arguments de tous. En évitant en effet tout formule aussi définitive que trop vite écrite. Bonne route en tout cas?

  16. Juste une réponse sur un point précis: Daniel disait : « Par contre, ce qui me choque notoirement est le misérabilisme (type: “Je suis un pauvre campagnard victime des méchants bourgeois citadins, donc il faut que vous fassiez tout ce que je veux”). Respectez vous vous-même si vous voulez être respectés! ».

    Je regrette que mon propos ait été compris comme une complainte:

    Pour moi comme pour plusieurs personnes ici, au contraire, je pense que oui, les « campagnards » doivent se prendre en main, sérieusement, et ça implique à mon sens qu’ils construisent leurs réseaux THD eux-même, car personne ne viendra les construire pour eux. C’était aussi je crois le sens de la remarque de Marc sur l’auto-financement des réseaux THD par les habitants.

    Encore faut-il que le cadre réglementaire et normatif permette ce genre de financement et de montage juridique et technique. Or à l’heure actuelle, il ne me semble pas du tout que ce soit le cas, l’approche gouvernementale et réglementaire étant forcément « top-down » (Avec d’abord un SDTAN, puis un appel a projet, puis une attente, puis une prise de relais via les RIP….) En *aucun* cas le financement direct par les citoyens n’est prévu.
    Voire même, quand bien même ces derniers arriveraient à « s’auto-fibrer », quel chance ya-t-il qu’un opérateur national accepte d’utiliser un tel réseau ? Déjà qu’il a été très dur qu’ils utilisent ceux des RIP….
    Bon, ceci dis, d’autres FAI viendront sûrement, et c’est bien ça l’important.

    Donc, bien plus qu’une approche jacobine du plan THD français, ce que veulent les gens ici, bien loin d’un misérabilisme rural c’est justement la possibilité réglementaire de faire des réseaux, sur domaine public, mais SURTOUT de les faire financer par les citoyens eux-même. On est parfaitement d’accord qu’un modèle économique basé sur les subventions n’est pas soutenable. Après, on peux même imaginer un système de « péréquation privée », pour dégager les moyens de fibrer les zones les plus difficiles d’accès, tout en demandant aux particuliers et aux professionnels de s’engager, tant financièrement que matériellement, sur un tel projet.

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