A cette heure, le montant des prêts du Grand Emprunt national dévolus au déploiement du très haut débit dans les zones supposées les plus compliquées diminuerait-il comme peau de chagrin ? Comment seront engagés ces fonds ? Quand ? Sur quels critères ? Bien des questions demeurent. Il serait même désormais question de « revoir » les bénéficiaires desdits fonds.
Rappels et questions pour se faire une idée, ou lancer un débat si mes informations sont fausses, quant à l’efficacité de ces investissements d’avenir. Et une petite idée, d’inspiration quasi planificatrice soviétique, en guise de conclusion.
Au départ, dans les « Investissements d’avenir », 2 milliards d’euros étaient annoncés pour soutenir le déploiement des infrastructures très haut débit. La Caisse des Dépôts est en charge de la gestion de ce fonds. Un groupe interministériel supervise l’opération. Tout cela est clair. Mais, comme souvent, là comme ailleurs, le diable se cache dans les détails. Et, en l’espèce, force est de constater la force lesdits détails. Démonstration.
Une première interrogation tient aux modalités opératoires d’engagement de ces fonds ? Comment ? Sur quels critères ? Quand ? On murmure ici ou là que, à ce rythme, ce capital de 2 milliards ne serait peut-être pas complètement engagé en 2011… Des mauvaises langues penseraient même que l’Etat aura encore un très belle cagnotte à la fin de l’année tant les procédures restent à construire, tant les vieilles dames en charge de la gestion prendraient leur temps. A juste titre sans doute, il s’agit bien d’argent public. Certes, certes. Bien entendu, il faut du temps…
Une seconde question nous taraude. Les « bénéficiaires » des ces investissements d’avenir numériques seraient en partie segmentés en trois catégories.
Un milliard irait aux trois grands opérateurs. Pour faire quoi ? Selon quel calendrier ? Où ? Avec quelles logiques de collaboration et de transparence afin d’assurer l’inter-opérabilité des solutions ? Les récentes annonces sur le déploiement des réseaux fibre nous laissent sur notre faim. Où est le « contrat » par lequel l’Etat se garantie de la bonne utilisation et de la dimension « service public » de ces fonds ? Qui prépare ce ou ces « conventions » ? Quand seront-elles portées à connaissance du public ? Nous ne pouvons pas en effet penser un seul instant que ce contrat ne soit pas quasi achevé. Une aide de l’Etat, s’agit-il d’un prêt ou d’une subvention, ne doit-elle pas faire l’objet de la même transparence que celles imposée aux collectivités territoriales en Europe ? Impensable pour un Etat qui se veut exemplaire. Nous sommes nombreux donc à attendre de comprendre l’économie qui préside à tout cela. Je cherche notamment encore à saisir les raisons qui poussent l’Etat à prêter à des grands opérateurs. Ne sont-ils donc pas capables de lever des fonds sur le marché financier ? Comment donc se justifiera ces engagements publics ? Mystère encore.
Outre ce milliard réservé à nos pauvres petits opérateurs nationaux comme Orange ou Free, 250 millions sembleraient affecter à d’autres solutions, le satellite par exemple. Utile sans aucun doute car nous savons bien que quelles que soient les solutions retenues, il restera toujours ces derniers abonnés empêtrés dans le blanc des zones blanches, oubliés des réseaux filaires et masqués des ondes radio. Alors vive le satellite comme ultime solution. A condition que ce soit bien la dernière des dernières des solutions. Absence de qualité de service, conditions de partage de la bande passante mystérieuses, j’ai du mal à croire que l’on pourrait renoncer à de vrais solutions pour cela.
Il resterait donc 750 millions pour soutenir le déploiement des réseaux THD en zones non hyper denses… 750 millions pour lancer un mouvement destiné à engager une dynamique pour raccorder 100% des français en THD en 2025… Faites le calcul… Les élus seront rares. Etrange quand même de constater à quel point l’Etat en appelle au relais de l’action des collectivités territoriales et réduit ses premiers engagements pour des réseaux en zones hors du jeu de la concurrence. N’est-ce pourtant pas là que l’effet levier de l’argent public ne serait pas le plus structurant ?
Surfant ainsi cette après-midi sur ces questions urgentes mais pourtant encore sans vraies réponses, au détour d’une conversation avec un très bon professionnel opérateur français, celui-ci me rappelait une solution. Sur le ton sans aucun doute de la boutade, il esquissait une idée aussi simple qu’efficace. Il suggérait d’envisager de voter une loi qui déciderait que lorsqu’une collectivité, par exemple, déploie un réseau fibre, les solutions ADSL seraient obligatoirement abandonnées, progressivement certes, mais abandonnées. Obligation serait faites à tous les opérateurs de migrer leur offre sur la fibre. Finis alors les problèmes de financement des réseaux de nouvelles générations, terminée cette concurrence « non bâtisseuse d’avenir » entre le cuivre et l’optique, place à des volumes de prises Fttx permettant enfin les innovations services. La France prendrait alors une avance déterminante. On trouverait même certainement des solutions de péréquation numérique. Cette idée serait-elle dans le contrat, explicite ou pas, Etat / grands opérateurs ? J’ai comme un doute. Dommage non ?
Bonne idée….à appliquer par exemple à titre expérimental à … Aumont Aubrac !
Dommage que je ne l’ai pas su ce matin avant un reportage de FR3 ( en fin de journal)
http://info.francetelevisions.fr/video-info/player_html/index-fr.php?id-video=&chaine=&id-categorie=JOURNAUX_LES_EDITIONS_REGIONALES_LANGUEDOC_ROUSSILLON_1920&ids=&time
Excellente idée, naturellement !
Dans la même veine, on pourrait aussi imaginer de faire tomber les infrastructures d’accès cuivre dans le domaine public, sur le modèle des brevets : toute installation réalisée il y a plus de 20 ans (hey, cela nous ramène à 1990, donc pas si loin…) serait rendue ouverte et neutre, obligeant ainsi les (le ?) opérateurs ex-propriétaires de ces infras à innover…